En collaboration avec l'Université de Hanoï, le professeur Muller (ULiège) a examiné de manière scientifique les connaissances anciennes sur les plantes médicinales au Vietnam. Résultats : plusieurs extraits ont montré des effets anti-inflammatoires, anticancéreux et antifongiques évidents.

Dans le nord du Vietnam, la médecine traditionnelle est encore très populaire. Les guérisseurs, principalement des femmes, y cueillent des plantes dans la nature et les utilisent pour soigner de nombreux maux. Le professeur Marc Muller, biologiste à l'ULiège, a estimé que ces connaissances anciennes pouvaient être mieux utilisées.

Ces plantes médicinales ne pourraient-elles pas constituer la base de nouveaux médicaments ? Et ne serait-il pas utile d'apprendre à mieux connaître ces plantes ? En effet, certaines peuvent aussi être toxiques. Tout ce qui vient de la nature n'est pas forcément sain. Il suffit de penser aux nombreux champignons extrêmement vénéneux.

 

Approche multidisciplinaire

Par l'intermédiaire de l'ARES - l'organisation faîtière des universités francophones qui coordonne la coopération universitaire au développement, financée par notre SPF - il a pu obtenir des fonds pour une collaboration avec l'Université de Hanoï. Le succès du projet repose essentiellement sur la réunion de diverses disciplines, ce qui était assez novateur au Vietnam.

Le professeur Muller s'est mis au travail avec une « task force » composée d'anthropologues, de botanistes, de biochimistes, de chimistes, de pharmacologues et de biologistes cellulaires. Les anthropologues se sont entretenus avec les guérisseurs sur le terrain pour savoir quelles espèces de plantes ils utilisent pour quels maux. Ils ont ainsi obtenu une liste d'une vingtaine d'espèces à analyser plus avant.

 

Poissons-zèbres

Les extraits de plantes ont été soumis à une batterie de tests. Ainsi, ces techniques ont immédiatement pu être introduites à Hanoï. Les extraits ont-ils un effet sur le système immunitaire ? Inhibent-ils la croissance des cellules cancéreuses ? Les tests biochimiques montrent-ils qu'ils ont des propriétés antioxydantes ?

Le professeur Muller est lui-même spécialisé dans le poisson-zèbre comme modèle d'essai. Ces petits poissons, qui nagent souvent dans les aquariums, sont idéaux pour tester les effets des extraits de plantes et des médicaments potentiels. À cette fin, on utilise des larves de moins de 5 jours qui ne sont pas encore considérées comme un animal à part entière. C'est le système le plus simple pour mesurer les effets sur un animal.

Du côté belge, le professeur Muller a également réuni diverses disciplines. Le professeur Pierre Duez (UMons), par exemple, a assuré l'analyse chimique des extraits. Le professeur Patrick Kestemont (UNamur) a utilisé le poisson-zèbre pour mesurer la toxicité sur les embryons. Enfin, les propriétés antioxydantes ont été examinées par le professeur Jacques Dommes (ULiège).

 

Anti-inflammatoire, anticancéreux et antifongique

Et puis la question clé : les analyses scientifiques confirment-elles les pouvoirs de guérison des plantes ? La réponse est étonnamment positive. Parmi les extraits, des effets anti-inflammatoires et anticancéreux clairs ont effectivement été observés. Un extrait a pu inhiber efficacement le développement de la moisissure. On a même trouvé des propriétés que les guérisseurs traditionnels ne leur attribuaient pas. En outre, il y avait aussi des plantes qu'il est préférable de déconseiller aux femmes enceintes.

Trois doctorantes se sont consacrées entièrement à la recherche, la moitié en Belgique, l'autre au Vietnam. Ce faisant, elles ont pu se familiariser avec les différentes techniques. Ainsi, l'Université de Hanoï peut désormais appliquer de manière autonome le modèle du poisson-zèbre.

Les trois étudiantes ont défendu leur doctorat respectivement à l'ULiège, à l'UMons et à l'UNamur, la dernière encore début 2023. Elles peuvent maintenant résolument renforcer la task force à Hanoï. Le projet a également donné lieu à une dizaine d'articles dans des revues scientifiques internationales.

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                                          Réunion de coordination à Hanoi. À l'extrême gauche, le professeur Marc Muller (© ULiège).

 

Une suite ? 

Après cinq ans, le projet a pris fin en 2022. Mais le professeur Muller planche déjà sur une suite. L'Université de Hanoï est également désireuse d'aller de l'avant. Comment améliorer l'industrie des plantes médicinales ? Comment le Vietnam peut-il se renforcer sur le marché des herbes médicinales, notamment en raison de sa concurrence avec la Chine ? Comment élargir la task force ?

Il n'est pas encore certain que le professeur Muller puisse trouver des fonds pour cela. Mais il a déjà posé des bases solides pour une approche scientifique des connaissances anciennes sur les plantes médicinales au Vietnam. Une contribution claire à l'ODD3, la santé et le bien-être.

 

Sources

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