En 2017, la Belgique a financé un projet unique initié par TRIAL International dans l’est de la RDC : favoriser l’utilisation de preuves photos et vidéos pour punir les crimes de masse. Avec des avocats locaux et des partenaires internationaux, l’organisation a permis de présenter des vidéos incriminantes au procès deux miliciens qui sévissaient au Sud Kivu.

Le contexte

En mai 2012, les villages de Lumenje et Kamananga (Sud Kivu) ont subi de violentes attaques des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé actif dans l’est de la RDC. Au total, plus de 40 personnes ont été tuées, plusieurs blessées et des maisons ainsi qu’une école primaire ont été pillées et incendiées. Le motif : le soutien allégué des villageois à une milice rivale des FDLR.

 

La solution

003-TrialApp_proc%C3%A8s%20Kamananga2.jpgA partir de 2017, TRIAL International a commencé à travailler sur cette affaire, dans le cadre de la Task Force pour la justice pénale internationale[1]. Elle s’est notamment adjoint l’expertise de deux ONG :  WITNESS, qui se spécialise dans l’utilisation de vidéos pour défendre les droits humains ; et eyeWitness to Atrocities, qui a développé un outil unique pour enregistrer, archiver et authentifier les vidéos dans le cadre de procédures juridiques

Ensemble, ces organisations ont aidé les avocats des victimes– une première dans toute la RDC. Fortes de leurs expertises complémentaires, les trois ONG ont aidé les avocats de parties civiles à collecter les preuves à charge les plus incriminantes, dont des vidéos. Elles leur ont notamment délivré une formation sur la présentation de preuves audio-visuelles et se sont rendues avec eux à Lumenje et Kamananga pour collecter des images.

Le 23 août 2018, le procès des commandants FDLR Kabumbre et Rafiki Castro s’est ouvert à Kalehe (Sud Kivu). Pour étayer les accusations de crimes de guerre et crimes contre l’humanité qui pesaient sur eux, les avocats ont présenté les preuves audiovisuelles collectées avec l’aide de TRIAL International. Guy Mushiata, coordinateur droits humains pour la RDC chez TRIAL International, était présent au procès : 

Quand les vidéos ont été projetées, l’atmosphère dans la salle d’audience a changé du tout au tout. L’image est un vecteur très puissant pour rendre compte de la brutalité des crimes, et du niveau de violence dont les victimes ont souffert. 

Le résultat

Quelques semaines plus tard, la justice a triomphé : les deux commandants ont été reconnus coupables de meurtres et actes de torture constitutifs de crimes contre l’humanité. La centaine de victimes parties à la procédure se sont toutes vues accorder des réparations allant de 5000 à 25.000 USD.

L’impunité en RDC est extrêmement répandue, y compris au sein du commandement des groupes armés », a commenté Daniele Perissi, responsable du desk Grands Lacs pour TRIAL International, à l’issue de ce verdict. « Cette affaire envoie un message clair à quiconque commettrait des abus en pensant que leur pouvoir militaire les place au-dessus des lois. 

TRIAL International poursuit ses efforts pour favoriser l’utilisation de preuves audiovisuelles pour lutter contre les crimes internationaux, notamment avec la publication d’un manuel à l’usage des praticien sur l’admissibilité de la preuve.

 

Ressource(s)

  • Lire l’interview croisée de TRIAL International et WITNESS sur leur projet audiovisuel en RDC.
  • Reportage photos © TRIAL International
  • Voir la vidéo présentée au procès Kamananga

Partenaire(s)


[1] La Task force pour la justice pénale internationale est un réseau informel d’acteurs internationaux qui coopèrent afin de soutenir le travail des juridictions militaires congolais dans l’investigation et la mise en accusation des auteurs de crimes de masse au Sud Kivu.